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Naissance et déportation. La mort du père

«A l’époque, mon village s’appelait Boriskovich, c’était en 1944, en pleine guerre.
Je ne connais pas mon père, en tout cas je n’ai aucun souvenir de lui. Lorsque l’Ukraine occidentale avait été occupée par les nazis…
Oui, mon père était pompier et ma mère femme au foyer. Or à l’époque, l’Ukraine occidentale avant 1940 appartenait à la Pologne, et ma mère était ouvrière agricole chez un riche propriétaire terrien polonais. Ensuite elle a donc épousé mon père, bien entendu il y a longtemps, bien avant ma naissance.
Tout ce que je peux vous dire, c’est que mon père n’a pas participé à la guerre. Il allait et venait entre le village et la forêt où se cachaient d’autres paysans. De temps en temps, il rentrait à la maison, et je pense que c’est à cette occasion que j’ai été fabriqué, pour ainsi dire, à l’occasion de ses visites. Ensuite, ce que je sais c’est qu’il a été dénoncé et a été tué.
II a été tué par ceux qu’on a appelé plus tard des banderovci, des partisans de Bandera et un mois et demi plus tard j’ai vu le jour, c’était en 1944. C’est dans ce village que nous avons vécu, jusqu’à la libération du village par l’armée Rouge et en 1949 ou 1948, encore une fois je ne m’en souviens plus, il y a eu une autre dénonciation et toute notre famille, à l’exception de mon père, bien entendu — ma mère elle avait 5 enfants, j’étais le cadet —, et bien toute la famille a été arrêtée et exilée, dans le nord, région d’Arkhangelsk, du côté d’un grand bourg, Kautlas. Nous y avons vécu 18 mois, j’ai été très malade, le climat était subarctique. Ma mère avait 5 enfants, mais seuls 3 d’entre-eux ont été exilés : moi-même, ma sœur qui s’occupait de moi et un de mes frères. Les deux autres frères sont restés en Ukraine, chez les membres de notre famille.