Біографії

Antanas  PETRIKONIS


Antanas Petrikonis naît en 1928, dans le village de Mociškėnai au sud de la Lituanie. Sa famille d’origine paysanne est pauvre et très patriote. Après la guerre, dès le retour des Soviétiques, Antanas rentre dans la résistance armée, d’abord en aidant les résistants puis, en 1948, en prenant les armes sous le nom de «Bateau». En 1951, il est arrêté dans le bunker construit près de sa maison natale et condamné à  25 ans de travaux forcés.
Après plusieurs séjours dans différentes prisons, il est  transféré dans le camp de Kengir, dans le Steplag du Kazakhstan, où il rentre dans l’organisation clandestine lituanienne. Il participe à la révolte de l’été 1954.
Après la révolte, il est transféré dans le Berlag de la Kolyma et ensuite dans le Ozerlag  de la région d’Irkoutsk. En 1956, son dossier est revu et sa peine réduite de moitié. En 1960, après un nouvel examen de son dossier, il est libéré, mais n’a toujours pas le droit de rentrer en Lituanie. Il y retourne quand même et, grâce à l’incompétence d’une jeune fonctionnaire, réussit à se domicilier dans son village natal.
Après son mariage, il obtient, malgré d’énormes difficultés, le permis de vivre à Kaunas chez sa femme. C’est là qu’il vit encore aujourd’hui.
Souvent il songe au destin de son pays : «La Lituanie a perdu trop de sang après la guerre. Si ces 26 000 hommes morts dans les forêts – pour la plupart des jeunes, des hommes d’idées, des patriotes – avaient eu des enfants, aujourd’hui le visage de la Lituanie serait différent. Mais ils ont défendu l’honneur de la Lituanie.»

L'entretien avec Antanas Petrikonis a été conduit en 2009 par Jurgita Mačiulytė.

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La résistance armée en Lituanie

"Surtout les derniers temps, la lutte était très difficile, vraiment… Tous avaient perdu l'espoir. Toutes les énergies, toutes les idées étaient étouffées… La Lituanie avait trop saigné, comme on dit, beaucoup trop… Nous, ceux qui restions, nous étions prêts à mourir, nous ne croyions plus nous mêmes qu'on arriverait à changer quelque chose. Les temps étaient très difficiles. Je me souviens quand nous marchions en 1945, c'était autre chose, complètement. Partout où tu allais, tous t'invitaient, te respectaient, t'aimaient. Mais après les gens se sont fatigués. Non pas qu'ils se soient fatigués mais ils ont commencé à avoir peur. Presque tous ont été éliminés, il n’en restait plus que quelques uns. Quand tu te rendais chez quelqu'un, il ne voulait plus que tu restes. La lutte des dernières années a donc été particulièrement difficile. On peut dire que ces grandes difficultés ont commencé à partir de 1949. Jusqu'en 1947, les Russes n'organisaient pas d'embuscades, nous étions les maîtres dès la nuit tombée. Mais, plus tard, ils faisaient des embuscades importantes et des nettoyages, ils arrivaient à quelques dizaines de milliers, encerclaient la forêt, allumaient des feux autour, puis passaient la forêt au peigne fin. Ensuite, nous nous sommes séparés en groupes plus grands. En 1945, les groupes comprenaient 20-30 personnes. Plus tard, c'était juste pour garder la résistance armée en vie. Le moral a baissé, chacun comprenait que même si on n'était pas battu, la lutte était perdue. J'ai survécu par miracle, j'ai été touché en tout par sept balles à travers les vêtements et…"
 

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Réflexions sur la résistance armée en Lituanie

"Surtout les derniers temps, la lutte était très difficile, vraiment… Tous avaient perdu l'espoir. Toutes les énergies, toutes les idées étaient étouffées… La Lituanie avait trop saigné, comme on dit, beaucoup trop… Nous, ceux qui restions, nous étions prêts à mourir, nous ne croyions plus nous mêmes qu'on arriverait à changer quelque chose. Les temps étaient très difficiles. Je me souviens quand nous marchions en 1945, c'était autre chose, complètement. Partout où tu allais, tous t'invitaient, te respectaient, t'aimaient. Mais après les gens se sont fatigués. Non pas qu'ils se soient fatigués mais ils ont commencé à avoir peur. Presque tous ont été éliminés, il n’en restait plus que quelques uns. Quand tu te rendais chez quelqu'un, il ne voulait plus que tu restes. La lutte des dernières années a donc été particulièrement difficile. On peut dire que ces grandes difficultés ont commencé à partir de 1949. Jusqu'en 1947, les Russes n'organisaient pas d'embuscades, nous étions les maîtres dès la nuit tombée. Mais, plus tard, ils faisaient des embuscades importantes et des nettoyages, ils arrivaient à quelques dizaines de milliers, encerclaient la forêt, allumaient des feux autour, puis passaient la forêt au peigne fin. Ensuite, nous nous sommes séparés en groupes plus grands. En 1945, les groupes comprenaient 20-30 personnes. Plus tard, c'était juste pour garder la résistance armée en vie. Le moral a baissé, chacun comprenait que même si on n'était pas battu, la lutte était perdue. J'ai survécu par miracle, j'ai été touché en tout par sept balles à travers les vêtements et…"
 

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La vie au camp de Kengir
Les autres prisonniers

«C'était étrange là-bas, on nous a emmené, aligné. J’ai vu qu’ils rentraient du travail gris, couverts de poussière. Les colonnes serpentaient, l’une derrière l'autre, 250 personnes dans chaque colonne, en rangs par cinq, tous se tenait par les bras. On ne pouvait pas marcher comme on voulait, librement. Il fallait se tenir par les bras. Tous numérotés, les numéros brillaient en blanc, même s'ils étaient écrits en noir. Les visages tannés, je regardais et ils semblaient être tous asiatiques. Là-bas, il faisait très chaud l'été, et le vent tannait aussi. Les gens travaillaient à l'extérieur.»

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La vie au camp de Kengir - La clandestinité

«Au début, on nous a gardés là-bas en quarantaine, il était obligatoire d'y rester 20 jours. Il y avait des Lituaniens qui venaient et demandaient : d'où, pourquoi, comment. Nous avons immédiatement rejoint l'activité clandestine. L'organisation clandestine là-bas était solide. On m'a présenté, demandé d'où je venais, pour quelle raison, comment. J'ai dit que j'étais partisan, capturé et arrêté. J'ai gagné grâce à cela une plus grande confiance. Nous nous sommes joints toute de suite à la lutte.»

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La répression de la révolte au camp de Kengir

«Ce matin du 26 juin, j'étais, semble-t-il, dans la zone des femmes, baraque n° 5. Soudain, on a entendu un brouhaha, un vrombissement de chars, des tirs de canons, à blanc évidemment. Quand un char tirait, les chiffons partaient dans l'air. Ils étaient chargés avec des chiffons, ce qui comptait c'était le bruit. Ils passaient à toute vitesse, sans regarder s'il y avait des hommes ou pas, les chenilles couvertes de sang. Il y avait une femme lettone, ils lui ont passé dessus, après cela il ne restait plus que des lambeaux de vêtements, plus de femme. On nous a mis dans les baraques qu'ils ont encerclées. J'étais avec un Ukrainien dans une baraque, les soldats tout autour. Je regardais les soldats, ils étaient en face de nous, la porte de la baraque ouverte. Lui, il mettait sa tête dehors pour regarder, les autres lui ont demandé combien ils étaient. Il a sorti la tête et vlan ! Droit dans la tête, il est tombé. Il lui restait un an de camp. Nous l'avons pris, mis sur les lattes en bois. Il a juste gargouillé et c'est tout, il est mort. Je dis que c'est bien que ce n'était pas ma tête. Voilà quel est parfois le destin de l'homme.»