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La matrice des peuplements spéciaux


Plus d’une centaine d’opérations de déportation furent engagées sous le régime stalinien, mais de toutes, la première déportation de masse dirigée contre les paysans soviétiques fut de loin la plus importante. Entre 1930 et 1931, plus d’un million huit cent mille « koulaks » supposés hostiles à la collectivisation furent « exportés » des régions riches en céréales vers les territoires inhospitaliers du Nord russe, de l’Oural, de la Sibérie et du Kazakhstan.

Cette « colonisation spéciale », selon la terminologie policière, n’était autre qu’une colonisation répressive destinée à maîtriser l’ennemi et le territoire. Il s’agissait de « rééduquer » le premier par la mise en valeur du second.

La « dékoulakisation » aboutit à la mise en place du système des « peuplements spéciaux » qui, de 1931 à la fin des années 1950, allait devenir une immense machine administrative chargée de la gestion des déplacés spéciaux, purs produits du Grand Tournant stalinien.

Dépossédés de tous leurs biens, déracinés avec leurs familles, assignés à résidence dans des villages surveillés par un commandant du NKVD, soumis aux travaux forcés, telle fut la destinée de ces nouveaux exclus dont la condamnation n’avait pas de terme.

Cette première déportation de masse constitua une expérimentation matricielle dans l’histoire des répressions soviétiques et préfigura la banalisation des déplacements forcés de populations à l’intérieur de l’URSS stalinienne.

À la mort de Staline, on recensait sur le territoire plus de deux millions huit cent mille colons spéciaux. Ils appartenaient à l’une des trente catégories que le pouvoir avait progressivement distinguées selon des critères sociaux, ethniques, confessionnels, politiques, ou purement géographiques.

Texte : Hélène Mondon

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